Un apperÇu de la DiversitE FranÇAISE

ou Un Casse-tete pour le reconstitueur


Introduction
Lors de l'arrivée des Français au Canada et dans les territoirs de la Nouvelle France, il ne faut pas croire qu'une identité existait, une sorte "d'exception culturelle" française. Bien au contraire, les particularismes et diversités regionales ne se dissipèrent pas au contact de l'immensité du continent.
La mentalité de l'homme de France a peu changé entre le XVIème et le XVIIIème siècle. La conception du monde et des lois qui régissent le destin de chacun ne fût pas outre mesure boulversée par le Siècle des Lumières et il faudra attendre la Révolution et la chute du roi Louis XVI pour assister à un changement de perception du monde environnant.


Dieppe - J. Vernet - 1765

Le Français en traversant la mer n'a pas d'esprit colonisateur et le Canada est une partie du royaume de France. Ce territoir possède seulement des qualités exotiques et un espace de liberté différents de ceux de la métropole. Il est surtout uen province de France régie par des lois et des coutumes plus avantageuses et l'acquisition de terre par le système des censives permet à un homme décidé et travailleur d'obtenir une réussite rapide. Ce succès débouche souvent sur un retour envisagé et souhaité en métropole. Les émigrants volontaires pour une installation définitive ne sont pas légion.

La seule chose qui soit unifiée au Canada est la coutume dite "de Paris", ensemble de règles juridiques régissant le droit coutumier.

En métropole, les modes de vie, les différentes traditions des provinces composant la France à cette époque en font une véritable mosaïque culturelle, linguistique, économique et parfois religieuse. Chaque province est une entité, un "pays". Il y a, par exemple, autant de différences entre un Provençal et un Morbihannais qu'entre un Suédois et un Berbère ! Cette problématique est multipliée par villages dans certaines régions comme la Bretagne.


Cherbourg - les frères Ozanne - vers 1760

Le natif d'une Province emmène avec lui ses us et coutumes. Il ne les abandonne pas. Il n'en a pas l'intention d'ailleurs puisque le passage au Canada est vécu comme temporaire. Un arrivant du Perche restera un Percheron, un Avignonais restera un Provençal. Le sentiment d'appartenance à une communauté régionale est ancrée dans l'état d'esprit d'un Français du XVIIIème siècle. Un habitant de Bergerac est d'abord du Périgord, puis d'Aquitaine et enfin de France.

Il suffit de se rappeler que deux décennies plus tard, il fallut beaucoup de patience aux premiers membres de l'Assemblée Nationale pour se comprendre. C'est en grande partie par souci d'efficacité que les représentants nommés par les communautés appartenaient à la petite noblesse ou à la classe sacerdotale qui étaient bien souvent les seuls à possèder le parler régional et le français.


Les langues
La langue communément appelée le français n'est en aucun cas au XVIIIème siècle commune à l'ensemble du territoir. Elle est uniquement parlée en Ile de France. Deux grands groupes linguistiques coupent le pays en deux parties :

Très longtemps, la seule langue d'expression commune aux deux zones fut le latin, principalement dans la rédaction des actes officiels et des édits. Au XIIIème siècle, Gaston de Béarn imposa pour la première fois l'Occitan dans ses textes officiels afin d'être compris par le peuple. Au nord, en revanche, il faudra attendre le règne de Louis XI au XVème siècle pour voir les mêmes textes rédigés en langue "vulgaire", soit le parler régional.


Les régions francophones

Les deux groupes Oil et Oc ne sont pas homogènes et sont composés à leur tour de variantes selon les régions :

Zone de langue d'Oc

Dans cette zone, nous mettons à l'écart le basque qui est une langue s'apparentant au groupe linguistique fino-hongrois, l'un des plus vieux et des plus mystérieux de la planète !


Les régions côtières possèdent elles aussi des variantes :

Dans les montagnes alpines, on discute en savoyard et aussi en patois italophone ou germanique

L'ouest de la France se divise en deux groupes : le breton dit "bretonnant" qui s'apparente aux langues gaéliques (gallois, irlandais, écossais) et le gallo, variante du français que l'on trouve en Ile de France.

Pour plus d'info sur la Bretagne voir les sites s'y rapportant

L'est de la France ne fait pas exception : on y parle le lorrain, l'alsacien avec deux variantes (Mulhouse au sud et Strasbourg au nord) et le franc-comtois.

Zone de langue d'Oil
En remontant des bords de Loire à la fontière belge, on parle :

Bien sûr, il existe des parlers locaux ou jargons. Par exemple en Brie où l'on parle briard, un village comme Cerçay a développé un jargonnage local : le cerçaillon. Pour dire qu'un terrain est marécageux, un habitant de ce village dira qu'il est "yauveux". Sans compter qu'il existe aussi des jargons ou argots de métiers utilisés par les corporations : le louchebem est l'argot parlé par les bouchers.

Bien entendu, ces listes sont loin d'être complètes mais elles donnent un aperçu de la diversité existant en France.


Roscoff - les frères Ozanne - vers 1760

C'est donc par défaut et par nécessité de simplification et d'unification que le français d'Ile de France fût adopté en Nouvelle France. Ce qui n'empêcha pas que l'on parlât toujours au quoditien dans sa langue natale. Et la chose n'était pas différente pour les soldats malgré le vrassage préconisé dans les troupes royales : un membre du Royal Roussillon pouvait être Picard !. Bien souvent, seuls les officiers parlaient le français. C'est seulement après plusieurs mois de service que les recrues abandonnaient leur patois pour le français. Et ce "troc" n'allait pas sans mal. Il faut donc s'imaginer des régiments "multilingues".

Cette même diversité prévaut en matière us, coutumes et costumes. Même si le costume "folklorique" que nous connaissons aujourd'hui est issu de celui du XIXème siècle, c'est bien au XVIIIème que les différences fondamentales furent initiées. Il était donc possible avec une quasi certitude de connaître la provenance de tel ou tel en regardant son habillement ou en l'écoutant parler.

Ces différences n'entravent aucunement le sentiment d'appartenance au Royaume. l'esprit régional est plus présent et permet une véritable décentralisation des institutions avec parlement de région, Cour des comptes, coutumes réglant la vie quotidienne. Les régions resteront farouchement attachées à ces prérogatives, n'hésitant pas à s'opposer aux représentants du Roi en ce domaine.
Au Canada, la Coutume de Paris fût adoptée dans un esprit de simplification et non pour une raison de centralisation. Elle permettait l'emploi d'un seul système de poids et mesure connu de tous. les transactions en étaient simplifiées et chacun quelque soit son origine, trouvait à son arrivée en Nouvelle France des points de repaire simples. Soldats de garnison ou marins n'avaient plus à se préoccuper de parités ou de comparaison. De Tadoussac à la Nouvelle Orléans, une aulne parisis de tissu restait une aulne parisis


Les Sables d'Olonnes - les frères Ozanne - vers 1760

Si aujourd'hui, nous parlons de "particularisme régional", au XVIIIème, nous dirions "identité et appartenance régionales". L'unité de la France telle que nous la connaissons est relativement récente : nous la devons à Louis XI. Mais cette unité reste théorique et avant tout politique. Et le gouvernement central du pays connait plusieurs sursauts d'indépendance des Grands Féodaux. La dernière d'envergure qui faillit bien réussir fut la Fronde durant la régence d'Anne d'Autriche et du Cardinal Mazarin. Mais les révoltes régionales ne sont pas éteintes : celle du Marquis de Pontallec en Bretagne contre l'imposition d'une souveraineté lointaine dirigée par Philippe d'Orléans n'en est qu'un exemple. Le seul lieu commun aux Français de cette époque est certainement un amour immodéré pour l'indépendance qui fera que bon nombres d'arrivants en Nouvelle France "s'ensauvageront" rapidement, les grands espaces offrant la liberté pour les plus aventureux.

Il est donc difficile de reconstituer un Français ou une Française sans tenir compte de ces particularités. L'identité canadienne ou louisiannaise n'apparaitra réellement qu'en réaction à l'intrusion anglaise après la défaite française. Les Acadiens sont quelque peu à part car étant originaires en grande partie de l'Ile de Ré et de l'ile de Sein, ils apportèrent avec eux une mentalité d'ilien déjà très protectionnistes.
Encore dans ce jeune XXIème siècle, l'identité française est imprégnée de ces différences, de ces traditions, de ces coutumes bien ancrées dans le quotidien. Peut-etre seul Paris, capitale cosmopolite a-t-elle perdu son âme régionale. Mais un Breton reste attaché à ses dolmens et ses langues et un Berrichon tient à ses bois de chataigniers et ses ronds de sorcière.

Donc le Reconstitueur (euse) doit tenir compte de cet élément déterminant que reprséente le plusralisme ethnologique en France. Il faut savoir d'où est originaire la personne que l'on souhaiter reconstituer. De là découlent la forme de ses sabots, de sa coiffe, de sa culotte, ses croyances ...

Mais la Compagnie des Cent Associés espère pouvoir vous aider et nous reviendrons prochainement sur les croyances et coutumes de cette belle mosaïque que se nomme France.

Quelques exemples de parlers...

Un mot...
   
Couvre-chef terme générique en français classique
Chapeau français d'Ile de France (Oïl)
Capiot gallo (Oïl)
Capel limougeaud (Oc)
Capéou périgourdin (Oc)
Chapel normand (Oïl)
Chapiot pays de Loire (Oïl)
Bitosse argot parisien (Oïl)
     
Une tournure de phrase...
 
Je m'en moque français

Peut me chault français classique
Il m'importe peu français classique
   
Un proverbe...
 
Votré tioul di lou léou
Limi ouné di lou lé
gascon
Vos fesses dans l'eau
Le mien dans le lit
français
Vo't fion dans la flotte
Mézigues dans le plummard
argot parisien
Votre postérieur dans l'eau
Mon séant en ma couche
français classique